Le gouvernement israélien, dont le Premier ministre, Naftali Bennett, est un dirigeant de la droite extrême et du parti des colons, tient parfaitement ses promesses en accélérant tous azimuts la colonisation, que ce soit en Cisjordanie, à Jérusalem ou sur le plateau du Golan. Cette politique agressive de colonisation, d’occupation et de nettoyage ethnique prend un tour de plus en plus hideux, avec la multiplication des attaques des colons contre les Palestiniens, menées avec la complicité active de l’armée d’occupation. Plus de 120 attaques contre des Palestinien·nes ou contre leurs habitations ont été comptabilisées en une seule semaine.
Dans le même temps et avec un cynisme total, Israël bannit Salah Hamouri de Jérusalem pour « défaut d’allégeance », puis ose signer un ordre classant comme « terroristes » six ONG palestiniennes de défense des droits de l’Homme, parmi les plus réputées dans le monde entier, avant d’en prononcer l’interdiction par un ordre militaire. La protection de ces ONG devrait constituer une ligne rouge absolue, et la faiblesse de la réaction internationale à cette opération israélienne est une honte.
Comment peut-on accepter de laisser l’Etat d’Israël décider du sort de ces ONG palestiniennes ? La « diplomatie discrète » de la France et des autres États européens a-t-elle l’intention de limiter ses objectifs à une suspension de l’exécution des décisions annoncées par Israël, laissant les ordres d’interdiction et l’accusation de terrorisme peser sur ces ONG, leurs salarié·es et leurs soutiens ? Une telle position serait d’une incroyable lâcheté. Pour Salah Hamouri comme pour les six ONG palestiniennes, nous attendons du plus haut niveau de l’État des déclarations publiques de soutien, la demande formelle qu’Israël revienne sur ses décisions iniques, la mise en place de pressions réelles pour y parvenir.
L’impunité dont bénéficie l’État d’Israël de la part de la communauté internationale favorise les tendances les plus extrêmes. Les provocations se multiplient à Jérusalem, notamment sur l’Esplanade des Mosquées, de la part de religieux juifs extrémistes. Les exactions de plus en plus nombreuses de la part des colons organisés en groupes paramilitaires, évoquent pour nombre de Palestiniens les actes de terreur commis par les milices juives au moment de la Nakba. Et la seule réaction du gouvernement israélien à ces exactions est d’étendre l’autorisation donnée à l’armée de tirer sur les manifestants palestiniens…
C’est dans cette situation, à laquelle il faut ajouter l’affaire Pegasus et sur fond de menaces militaires contre l’Iran, que le 30 novembre le président de la République a reçu Yaïr Lapid, le ministre israélien des Affaires étrangères, avec force démonstrations d’amitié et sans laisser filtrer la moindre exigence.
C’est un bien mauvais calcul. L’avenir, quelles que soient les hypothèses d’alternance à terme, ne peut se construire que sur la clarté, le respect des principes, l’exigence de la justice pour la Palestine et les Palestiniens. Cela n’a aucun sens de parler d’une hypothétique et lointaine discussion sur une solution à deux États en laissant la colonisation se développer et le gouvernement israélien attaquer les organisations de la société civile palestinienne.
Ne pourrions-nous pas attendre de la présidence française du Conseil de l’Union européenne qu’elle porte de manière forte cette exigence de justice, qu’elle favorise les pressions nécessaires sur Israël tout en résistant énergiquement aux sollicitations israéliennes, et qu’elle affirme son refus du régime israélien d’apartheid imposé aux Palestiniens ?
Le premier semestre de cette année 2022 va être marqué par l’élection présidentielle et les élections législatives en France. Avec la Plateforme des ONG pour la Palestine, nous demanderons aux candidat·es de se tenir du côté du Droit et nous les interrogerons sur leurs intentions.
Mais avant tout, nous continuerons avec nos partenaires à mener nos campagnes avec toute la détermination nécessaire, notamment contre le régime israélien d’apartheid dans toutes ses dimensions, pour l’interdiction des produits des colonies israéliennes dans l’espace européen et contre toute relation économique avec la colonisation, pour la levée immédiate et sans condition du blocus de Gaza, et pour un soutien sans faille à la société civile palestinienne et aux organisations palestiniennes de défense des droits de l’Homme.
Bertrand Heilbronn, 28 décembre 2021